Chroniques et états d’âmes ruraux par Jérôme Laronze

Nous sommes en septembre 2014 quand je reçois un courrier m’informant que mon exploitation fera l’objet d’un contrôle portant sur l’identification de mes bovins. Celui-ci se passera bien, et ne mettra en évidence aucun défaut majeur, juste des hors délais de notifications (déclaration des mouvements des animaux à l’EDE, Établissement départemental de l’élevage).

Par la suite, sans doute frustrée d’une chasse si maigre, l’administration, via la Direction Départementale de la Protection des Population (DDPP) m’informe qu’à la vue de ces hors délais elle refuse de valider mes déclarations de naissances et exige que je prouve, à mes frais, les filiations mère/veau par des tests ADN, et que dans l’attente de ceux-ci mon cheptel est interdit de tout mouvement.

Quelques jours plus tard, en entretien téléphonique avec une agent de la DDPP, j’exposais mes réticences à justifier que la meumeu 9094 est bien la mère du veauveau 4221 par des méthodes relatives à l’identification criminelle. Cette personne me récita alors son catéchisme administratif et bafouilla quelques arguments que je mis facilement à mal ce qui me valut d’entendre que ce n’était pas grave et que si je refusais de me conformer à ses exigences, mes animaux entreraient en procédure d’élimination (entendez « abattus ») à mes frais et collectés par le service d’équarrissage puis de clore en déclarant cette phrase qui me revient quotidiennement en tête : « Moi je m’en fiche ce ne sont pas mes bêtes ». Pour avoir en d’autres temps côtoyé cette personne, je peux pourtant affirmer qu’elle est ni de sotte ni de méchante nature et me demande quel est le mal qui a corrompu son esprit. Si la Grèce antique avait ses rites et ses croyances, aujourd’hui, au nom de quels dieux, sur l’autel de quelles valeurs m’a-t-on promis l’hécatombe ?

Dans la continuité, la DDPP me submergera de menaces, de mises en demeures, d’injonctions, d’intimidations et de contrôles sur ma ferme avec à chaque fois, toujours plus de gens en armes alors que j’ai toujours été courtois et jamais menaçant. Ces manœuvres furent pour moi l’occasion d’observer des comportements inopportuns comme par exemple le jour où, venu me confisquer mes documents accompagnements bovins (DAB), la chef se plaira à taquiner les gendarmes au sujet de la signalétique défectueuse de leur véhicule, dans un comportement relatif à celui de l’adolescente cherchant à évaluer sa cote auprès des hommes, émettant éclats de rires et blagues analogues à celle du poulet aux amandes. N’a-t-on jamais appris à cette personne qu’il est des circonstances où la bonne humeur affichée des uns est une insulte faite aux autres ?

(…)

Le 6 juin 2016, cette administration est revenue avec encore davantage de gens en armes qui m’encerclèrent immédiatement, et, après des salutations négligées de la part de tous ces importuns, toujours la même chef débuta par un rappel de sa liturgie administrato-réglementaire et, alors que je pensais la logorrhée arrivée à son terme, celle-ci m’annonça avec grande satisfaction les lourdes peines prononcées à mon égard et, avec tout autant de satisfaction, que le délai pour un éventuel appel était expiré. Plombé d’apprendre ainsi la perte de ma virginité judiciaire, mais face à une telle orthodoxie administrato-réglementaire, je déclarais néanmoins mon étonnement, en évoquant une surface marchande maconnaise, que l’on pourrait nommer « intersection marché », qui a pendant deux semaines, en juillet 2015, au plus fort de la crise de l’élevage, fait une promotion sur la viande d’agneaux, en arborant au rayon boucherie un ostentatoire panneau de cinq mètres carrés, avec la mention « agneaux de Bourgogne » alors que la viande fraîche était irlandaise et la surgelée néozélandaise et que de plus, la viande de bœuf bénéficiait d’un étiquetage aussi approximatif que fantaisiste.

(…)

A cette même époque, sous mandat syndical, je siégeais à la cellule d’urgence départementale mise en place pour la crise de l’élevage. A cette occasion, la directrice adjointe de la DDPP a présenté la mesure douze du plan de soutien à l’élevage, portant sur un renforcement des contrôles de l’étiquetage des viandes et sur les mentions trompeuses en grandes surface de 25% . A cette annonce, je pris la parole pour signifier mon approbation et l’interroger sur les moyens financiers et humains mis à sa disposition pour atteindre ces objectifs. Non sans embarras, elle m’a répondu pas un sous de plus pas un agent de plus. En toute évidence 25% de zéro ne font toujours pas beaucoup plus que la tête à Toto !

J’en reviens à la journée du 6 juin 2016. Après avoir entendu moult menaces, intimidations et humiliations, les sinistres lurons ont décidé de faire un tour des pâtures. Arrivant dans une où paissaient plus de vingt bovins, les agents de la DDPP eurent fantaisie de les serrer à l’angle d’une clôture en barbelé et d’un ruisseau puis ont débuté la vocifération du matricule des animaux, qui, eux même paniqués par la meute hurlante, se sont précipités dans le ruisseau avec un fracas extraordinaire. Voyant que des animaux étaient en difficultés dans le ruisseau je m’approchais de ceux-ci. La première réaction de la chef fût de me dire que cela était entièrement de ma faute, même si je me demande encore comment, puisque j’étais à 100 mètres de là sous le joug de matraques, tasers, et autres fusils mitrailleurs. Toujours est-il que cinq animaux gisaient au fond du ruisseau, ayant abondamment bu la tasse et lourdement souffert du piétinement des presque vingt autres. J’ai donc, dans l’urgence et à mains nues tenté de sortir les animaux.

Agents DDPP et gens en armes se joindront à moi en prenant bien soin de ne pas mouiller leurs chaussettes. Les uns tirant sur les pattes, les autres donnant des coups de matraques, ou suggérant l’emploi du taser et les fusils mitrailleurs devenant plus encombrants qu’autres choses… La nécessité d’un tracteur s’imposant, je suis rentré seul à la ferme en chercher un avec des cordes, et celles-ci en main, je me suis demandé s’il n’y aurait pas un usage plus radical à en faire en les associant à une poutre et à un quelconque point surélevé. Mais pour aboutir la chose prend un certain temps et ne me voyant pas revenir, ils pourraient arriver avant. Et puis cette bande de dégourdis arrivera-t-elle à extraire les animaux sans moi ?

Il est bon de préciser que cette pâture est mise en valeur par ma famille depuis le 19ème siècle et que jamais le moindre incident ne fût à déplorer sur celle-ci. Des suites de cet « incident », les cinq bovins périront. Là-dessus la chef décidait d’interrompre le contrôle. Me trouvant seul avec elle (alors qu’elle prétendait avoir besoin de huit gens en armes pour garantir sa sécurité) qui changeait de chaussure, elle m’exprima tout le dégoût que je lui suscitais et m’insinuait l’encombrant que j’étais pour la société. Chuchotant entre collègues, je les entendais dire que je n’avais pas l’air très gai et qu’il n’était peut être pas prudent de me laisser seul et s’en allèrent.

(…)

Il nous est souvent souvent reproché de ne pas être administrophile, et on s’adresse à nous comme à des demeurés qui ne comprendraient pas ce qu’on leur demande, alors que c’est justement parce qu’on comprend bien où que ça nous mènent qu’on a du mal à le faire. Aujourd’hui en agriculture la pire calamité c’est pas la sécheresse, c’est pas la grêle, c’est pas le gel, c’est la calamité administrative qui nous pond des textes qui profitent toujours aux mêmes, abscons, contradictoires, contre-productifs, absurdes qui sont l’antimatière du bon sens paysan ! (…) Contrairement à certains parasites, qui officient dans la confidentialité d’immeuble maconnais par exemple, notre travail il est à la vue et au su de tous, exposé le long des routes et des chemins, alors quand le paysan est en mesure de bien faire il en tire satisfaction, orgueil, amour-propre et accessoirement salaire, mais qu’advient-il lorsque celui-ci est mis en incapacité de faire ? En définitive ce n’est rien d’autre que la persécution du vital par le futile. (…) Il y pas si longtemps en France, la population comptait 50% de paysans et le sol 50% d’humus, aujourd’hui, nous sommes 4% et il reste pas bien plus d’humus dans le sol. Ben quand on sait qu’étymologiquement, humus est la racine du mot humanité, je me demande s’il y a encore beaucoup d’humanité dans notre société ! Moi je pense que la république est une pute et la finance sa mère maquerelle !

(…)

Alors, ainsi installé, je pleurais sur le paradoxe du suicide qui satisfait ceux qui ne vous apprécient pas, et est susceptible de peiner les éventuelles personnes qui vous apprécient. Je pleurais aussi sur la trahison de ma propre colère, celle que je ressentais aux funérailles de mes camarades d’école respectivement pendu et noyé. Car, outre la peine et la tristesse, je me souviens avoir été envahi de colère à leur encontre, de nous laisser avec notre chagrin et l’image de cette jeune femme effondrée sur la boite qui renfermée son petit frère, de n’avoir rien dit, de ne pas s’être battu autrement qu’en utilisant pour seule arme le sacrifice de leurs vies que la société rangera, avec leur dépouille, purement et simplement six pieds sous terre.

Si je devais ici faire vivre leur mémoire je parlerai de ce que sont les paysans. Ils étaient de ceux qui ne travaillent pas en priorité pour un salaire mais pour l’amour du travail bien fait, du sillon droit, des animaux bien conformés, du cep bien taillé, du lait propre et de la couleur des blés, quitte trop souvent, et on doit le déplorer, à se laisser éblouir par l’agrochimie et autres doux leurres sources de douleurs. Car ils sont là les vrais artistes, ces conservateurs du savoir-faire qu’au Japon on nommerait « trésor national vivant », les virtuoses de l’adaptation et les artisans de votre satiété.

Ils existent encore les travailleurs, les opiniâtres, les taiseux, les humbles, les enracinés qui œuvrent en communion avec leur territoire et sont assassinés quotidiennement dans un crime silencieux.

Récemment encore, une enquête menée en lycée agricole indiquait que le revenu arrivait en lointaine position dans les objectifs de leur futur métier. Dans cette société du fric quel avenir pour ces jeunes candides ? Mais si ceux-ci réclament rémunération de leur travail, qui le leur paiera ? L’État (qui paiera peut être en 2017 les aides 2015 !) ? Bigard ? Lactalis ? Auchan ? Carrefour ? Qui est prêt à remettre 60% de son pouvoir d’achat dans la nourriture ? Les précarisés de Macron ? Les syndicats qui soutiennent la paysannerie comme la corde soutient le pendu ?

(…)

L’inquisition républicaine viendra finir son contrôle, ne me laissant à l’issue de celui-ci que des carbones illisibles et des bleus à l’âme. Puis de manière aussi soudaine qu’inattendue elle m’indiquera qu’après expertise de mon dossier la très grande majorité des animaux figurant sur la liste de ceux à éliminer n’avaient pas lieu d’y figurer, qu’elle passait l’éponge sur les autres et que ma situation serait régularisée dans les plus brefs délais. Je laisse à chacun le soin de trouver les mots pour nommer et qualifier ceux, qui d’abord cognent et ensuite réfléchissent. A toutes fins utiles, je tiens les documents qui en attestent à la disposition de mes collègues paysans confrontés à cette procédure. Je fis quand même faire, à mes frais, quelques tests ADN qui confirmèrent l’honnêteté de mes déclarations. Celle qui, orgueilleuse d’avoir bloqué mes boucles à Mâcon, me dira sur un ton badin que mes boucles sont récupérable à l’EDE. Bien qu’étant en règle, je tardais à recevoir mes DAB, je téléphone donc à la DDPP où la chef de service me répond. Je lui fais immédiatement part de mon soulagement d’être régularisé mais m’étonnais de ne pas recevoir mes DAB, et, de m’entendre répondre sur le ton maniéré, agaçant et méprisant qui lui est intrinsèque, qu’elle a effectué toutes les démarches, que cela ne la concerne plus, et qu’elle a autres choses à faire que de courir après les cartes vertes de Mr Laronze, sur ce merci au-revoir.

Les mois passaient et je n’avais toujours reçu qu’une partie des DAB, quand j’ai appris que le reste s’était noyé dans les marécages administratifs des bords de Saône et personne ne savait quels DAB. De leurs coassements, les crapauds du marécage demandaient à moi, l’Al Capone de l’élevage qui nécessite d’être mis sous le joug de huit gens en armes, moi le faussaire qui doit prouver ses déclarations par des tests ADN, moi que l’on a mis à l’amende, moi le taulard sursitaire, de produire
une liste des DAB me manquant et me les rééditèrent sur la bonne foi de celle-ci.

(…)

Constante dans ses incohérences, la DDPP m’ordonnait de souscrire à un suivi personnalisé payant auprès de l’EDE, sur qui pourtant, elle rejette la faute de l’envoi tardif des documents, alors voilà pourquoi un beau matin un brave type de l’EDE que je connais, et une très emmitouflée jeune femme (qui n’a pas jugé utile de se présenter) sont venus me faire signer les trois feuilles du contrat. Après un échange franc et courtois, et refusant le café que je leur proposais, ils sont repartis avec douze morceaux de feuilles non signées.

Dans les dommages en cascades, étant devenu un « client à emmerdes », mes vétérinaires ne souhaitent plus intervenir chez moi. J’étais pourtant l’un de leurs presque rares clients à régler ses factures à échéances exactes, (…) les vétérinaires étant des partenaires importants dans la conduite d’un élevage. Je constate que ce cabinet à une façon très personnelle de rendre grâce. D’autant plus qu’au cours de successives acquisitions, fusions et absorptions il est en situation de monopole sur mon secteur.

Toujours dans la période 2015/2016, je participais aux réunions d’élaboration de la charte des contrôles en exploitations agricoles. Cela a débuté à la préfecture, sous la présidence du préfet. Je m’y rends sans a priori, riche de mon expérience et avec la volonté de construire quelque chose. Après la déception de découvrir que la chose n’était pas une initiative locale, mais une injonction de Matignon via la circulaire 5806/SG du 31 juillet 2015, et que l’administration avait déjà bien ficelé le dossier avec la FNSEA (opérateur historique du syndicalisme agricole mais non représentatif et non majoritaire). Un modèle étant même en annexe de la circulaire. Un sentiment de complicité de tartuferie montait en moi alors qu’en même temps j’apprenais qu’en Saône et Loire 50% des notifications sont faites hors délais, me rassurant ainsi sur la pérennité de certains emplois.

(…)

Sous son vernis de mesurettes et d’éléments de langage en novlangue orwellienne, cette charte n’apporte aucune sécurité aux contrôleurs, est avant tout un outil de communication au service de quelques hauts responsables, vers qui se tournent les médias quand un contrôleur se fait assassiner (les suicides de paysans corrélatifs à un contrôle sont très vite étouffés par l’administration et la profession) afin qu’ils puissent, la main sur le cœur, la bouche en cœur et en chœur évoquer la charte, et dire : « Nous avons tout fait pour éviter cela » et ainsi se disculper de toutes responsabilités.

« Preuve est faite que visages dévots et pieuses actions nous servent à enrober de sucre le diable lui-même. »
William Shakespeare

Ne disposant pas suffisamment d’hypocrisie, je me suis abstenu de signer cette charte.

Printemps 2017. Jérôme Laronze paysan à Trivy entre Saône et Loire.

Chroniques et états d’âmes ruraux, par Jérome Laronze

 

2 et 3 septembre 1792: L’effroyable dépeçage de la princesse de Lamballe par les égorgeurs sans-culottes et l’assemblée nationale française la nuit du 31 juillet au 1er août 2020 !

Non seulement sa tête est promenée dans Paris sur une pique, mais son sexe sert de moustache à un de ses bourreaux.

Sur les 8 heures du matin, le 3 septembre 1792, deux gardes nationaux pénètrent dans la chambre de la princesse de Lamballe à la prison de la Force. Sans égard pour son air défait, ils lui intiment l’ordre de les suivre pour être transférée à la prison de l’Abbaye. Arrêtée le 10 août précédent aux Tuileries avec le couple royal, la surintendante de Marie-Antoinette a une mine de déterrée. Elle n’a pas dormi de la nuit.

Elle a rêvé que Marat l’égorgeait sur un monceau de cadavres avant de lui dévorer le coeur. Elle ne veut pas quitter sa cellule. Les rumeurs des massacres opérés depuis la veille dans les prisons parisiennes sont parvenues jusqu’à elle. Toute la nuit, elle a entendu les cris, les hurlements, les roulements de tambours, les injures et les râles. La tuerie aurait été provoquée par la folle rumeur d’un complot aristocratique. Il se murmure que des royalistes auraient planqué des armes dans les prisons pour fomenter une contre-révolution. Le peuple mené par de sanguinaires sans-culottes égorge des centaines de nobles, mais aussi de prêtres, de femmes et d’enfants. Ils sont éventrés, démembrés, hachés, piétinés, désossés et même bouffés ! Ce matin-là, le soleil hésite à se lever, répugnant à illuminer un Paris rougi par les massacres…

Les détenus égorgés à la chaîne

Les deux gardes nationaux se sont retirés pour aller chercher des ordres. Pendant ce temps, la foule rassemblée autour de la prison commence à scander le nom de Lamballe pour réclamer sa mort. Celle-ci tombe évanouie. Sa femme de chambre, qui n’a pas voulu la quitter, la fait revenir à elle. Elle délire. Vers 11 heures, la porte s’ouvre avec fracas, poussée par les deux mêmes gardes nationaux qui lui ordonnent de venir à l’instant parler à des commissaires de la commune l’attendant au greffe. Le temps de passer une robe blanche toute simple et d’enfermer sa magnifique chevelure blonde dans un bonnet de coton, elle les suit. Comme elle hésite encore, ils l’empoignent sans ménagement par le bras.

Dans le greffe, plusieurs sinistres membres du comité de surveillance de la Commune du 10 août, ceints de leur écharpe, jugent les détenus à la chaîne. Aussitôt condamnés à mort, ils sont égorgés par des hommes couverts de sang. Voilà qui plaît à Manuel Valls… À la vue des cadavres et du sang, la princesse de Lamballe s’évanouit de nouveau. Sa femme de chambre la relève. Les menaces reprennent de plus belle. Elle perd de nouveau connaissance. Elle se tord sur le sol. Enfin, la voilà en état de répondre.

« Si vous ne jurez pas, vous êtes morte »

Un juge brandit trois lettres qui ont été trouvées dans son bonnet, dont une de Marie-Antoinette. L’interrogatoire débute :

– Qui êtes-vous ?

– Marie-Louise, princesse de Savoie.

– Votre qualité ?

– Surintendante de la maison de la reine.

– Aviez-vous connaissance des complots de la cour au 10 août ?

– Je ne sais pas s’il y avait des complots au 10 août, mais je sais que je n’en avais aucune connaissance.

– Jurez la liberté, l’égalité, la haine du roi, de la reine et de la royauté.

– Je jurerai facilement les deux premiers, je ne puis jurer le dernier, il n’est pas dans mon coeur.

Entendant cette réponse, un ancien valet de chambre de la princesse mêlée à la foule se penche vers elle. « Jurez donc, si vous ne jurez pas, vous êtes morte. » La princesse se tait. Alors, le juge prononce la phrase : « Qu’on élargisse madame. »

« Je suis perdue »

Comment faut-il interpréter cet ordre ? Certains le prennent au premier degré : le tribunal fait relâcher la princesse. Celle-ci sort donc par le guichet. Voyant les cadavres des détenus assassinés, elle aurait été prise d’un malaise. D’où la méprise des tueurs, qui, la croyant déjà frappée, abattent leurs armes sur elle. Pour d’autres, la phrase du juge est un code arrêté avec les tueurs pour les appeler à frapper. Madame de Lamballe sort donc dans la cour de la prison. Quelqu’un lui recommande de crier « vive la nation ». Mais la vue des cadavres lui fait dire : » Fi ! L’horreur ! » Elle ajoute : « Je suis perdue. » Aussitôt, un garçon perruquier ivre tente de lui enlever sa perruque à la pointe de son sabre. Il fend le front de la malheureuse, qui s’effondre en sang. Deux hommes grimaçant de haine la saisissent sous les bras pour l’obliger à marcher sur les cadavres. Elle est au bord de la syncope. Dans la foule, des voix crient » grâce, grâce ! ». Les assassins hésitent quelques secondes, mais un certain Charlat, tambour de son état, lui porte un terrible coup de bûche à la tête qui l’étend raide. De multiples coups de pique l’achèvent.

Le nègre Delorme, ramené de Saint-Domingue par Fournier l’Américain, s’empare du cadavre pour le déshabiller et éponger le sang afin d’en faire admirer la blancheur aristocratique. Ses gros doigts violent la morte. Il est hilare. La foule s’époumone. Les yeux brillent d’une fureur incontrôlable, les gorges hurlent des insanités, les bras dessinent des obscénités. Un garçon boucher nommé Allaigre s’empare de la tête de la princesse, qu’il sectionne adroitement avec un long couteau de boucher. C’est atroce. L’homme s’enfuit avec son butin sous le bras, bientôt il plantera la tête sur une pique. Pendant ce temps, on continue de profaner le corps dénudé de la princesse. On lui découpe les seins. Le même Charlat déchire les entrailles et arrache le coeur. Plus horrible, un inconnu découpe le sexe, qu’il porte à sa bouche pour en faire une moustache. Certains rapportent des scènes d’anthropophagie.

Insulter le couple royal

Pendant ce temps, la troupe qui s’est emparée de la tête et du coeur entreprend une tournée de Paris pour montrer son trophée. Premier arrêt chez un marchand de vin, rue du cul-de-sac des Prêtres. Les égorgeurs déposent madame de Lamballe sur le comptoir pendant qu’ils vident des pichets de vin. Après avoir obligé le tenancier à boire, la troupe repart. Deuxième arrêt chez un perruquier pour qu’il « accommode la tête de madame de Lamballe ». Menacé de mort, il lui faut obéir. Il lave la longue chevelure blonde collée par le sang, la tresse et la poudre. « Au moins, maintenant, Antoinette peut la reconnaître », lance malicieusement quelqu’un.

Le cortège prend la direction de l’abbaye de Saint-Antoine pour présenter la tête et le coeur à l’abbesse, ancienne amie de la princesse. Cette politesse effectuée, Charlat, qui tient toujours la pique, prend la direction de l’hôtel de Toulouse, demeure de la princesse, pour « faire baiser à cette… ses beaux meubles », mais il y renonce pour se rendre aux Tuileries. Comme on ne les laisse pas entrer avec leur sanglant trophée, ils font demi-tour. C’est alors que surgit l’idée de se rendre à la prison du Temple pour insulter et effrayer le couple royal.

La tête récupérée par un proche

Trois heures viennent de sonner. Sortant de table, Louis XVI et Marie-Antoinette entendent une rumeur enfler. Des tambours battent. Bientôt le cortège est sous leur fenêtre. Des hurlements. Que se passe-t-il ? Un garde municipal, qui découvre le spectacle hideux, referme aussitôt les fenêtres et les rideaux pour épargner le couple royal. L’agitation s’accroît dans la rue. On prend peur. Plusieurs officiers accourent dans la pièce en demandant au Roi de se montrer à la fenêtre pour calmer la foule. Louis XVI exige de savoir ce qui se passe. Un jeune officier répond : « Eh bien, Monsieur, puisque vous voulez le savoir, c’est la tête de madame de Lamballe qu’on veut vous montrer. » Ces mots glacent d’horreur la reine, qui s’évanouit. Ses enfants fondent en larmes. Dehors, les cris se font plus menaçants. On injurie la reine. Les gardes municipaux empêchent l’horrible cortège de pénétrer dans la prison du Temple en plaquant un ruban tricolore sur la porte d’entrée. Colère des tueurs. Finalement, on négocie. Les assassins de la princesse sont autorisés à faire le tour de la tour du Temple, où loge la famille du Roi.

La balade n’est pas achevée. Madame de Lamballe va maintenant se promener sous les fenêtres du Palais-Royal pour saluer le duc d’Orléans, son beau-frère, qui déjeune. Il en perd l’appétit. Direction les Halles, où un boucher s’empare du coeur, le hache et offre à la foule de le manger. Le steak tartare ne faisant pas encore partie de la gastronomie française, tout le monde refuse. Les chiens se régalent. Enfin, la tête et même le corps que les barbares traînaient avec eux sont jetés sur un tas de cadavres devant le Châtelet. Un proche de la famille de Lamballe, qui avait suivi les assassins toute la journée, parvient à récupérer la tête pour la remettre à monsieur le duc de Penthièvre, beau-père de la princesse de Lamballe, qui la fait enterrer à Vernon.

Et c’est cette république qui veut donner des leçons d’humanité…

Source :  http://louis-xvi.over-blog.net/2016/09/03-septembre-1792-l-effroyable-depecage-de-la-princesse-de-lamballe-par-les-egorgeurs-sans-culottes.html?utm_source=_ob_share&utm_medium=_ob_twitter&utm_campaign=_ob_share_auto

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La nuit du 31 juillet au 1er août 2020 par Marie Challe

La nuit du 31 juillet au 1er août 2020, l’assemblée nationale française a adopté un amendement autorisant l’avortement jusqu’à terme. Nous ne discuterons pas ici du critère avancé de « détresse psychosociale » et de ses contours troubles. Nous ne prétendrons pas non plus que ce meurtre organisé d’enfants en bonne santé est plus révoltant que celui, qui avait déjà cours, d’enfants handicapés. Mais cet élargissement au maximum du nombre des victimes potentielles est une occasion de soulever — la dernière, peut-être — le voile qui recouvre les infanticides perpétrés en blouse blanche.

A travers nos esprits étourdis par les vagues continues de l’actualité scandaleuse, à travers nos imaginations insensibilisées à force d’images choc, la pensée d’un nourrisson mis à mort par poison devrait encore parvenir à nous toucher. A nous donner le sursaut de colère et d’énergie combative qui s’empare d’une conscience saine devant le mal.

Car au fond, il n’y a plus que cela à dire. Point de longue considération métaphysique, point de délibération sur les causes, le contexte, les intentions. Celui qui prétend encore au nom d’homme sait bien qu’au-delà des opinions, des époques et de sa liberté même, demeurent un bien et un mal qui nous dépassent. Et que tuer les bébés appartiendra toujours à la seconde catégorie.

J’ai dit « qui peut prétendre au nom d’homme », et pourtant nous ne sommes pas des monstres sanguinaires. Alors comment notre peuple se trouve-t-il engagé dans cet abîme ? Accoutumance ; indifférence ; lassitude ; peur, aussi.

La loi n’est pas encore passée ; il reste peu de temps, mais juste assez pour retrousser nos manches. Pour crier la vérité en place publique, pour descendre dans la rue sans craindre d’attraper le virus ou même de désobéir à un gouvernement criminel si celui-ci devait nous l’interdire sous différents prétextes.

Il ne dépend pas de nous de sauver le monde de l’invasion du mal, mais cette petite portion là, cette petite part, elle, dépend de nous. Nous conservons toujours au fond de nous un courage que nous réservons pour une fantasmagorique occupation nazie au cours de laquelle, nous n’en doutons pas, nous serions de ces résistants héroïques qui vont jusqu’au martyr. Mais si cette heure sombre là ne nous semble pas digne d’étrenner notre héroïsme de réserve, qu’est-ce qui le sera ? Quel palier dans l’abomination attendons-nous ?

Soyons ceux qui aurons su dire : « vous n’irez pas plus loin ».

 

« Dites aux petits enfants de prier pour la France, car elle en a grand besoin. »

 

Novembre 1947, la révolution gronde en France. Le pays est au bord de l’abîme : faillite économique due à une gestion calamiteuse de l’après-guerre, impuissance des pouvoirs publics, grèves à caractère insurrectionnel dans un climat international de guerre froide, tout est prêt pour le Grand Soir que les communistes attendent en France depuis 1944. (…)

« Le moment viendra où le danger sera grand, on croira tout perdu, là je serai avec vous, ayez confiance », avait dit la Très Sainte Vierge en 1830.

Que l’Immaculée soit intervenue en 1947 dans nos affaires politiques remet en cause l’agnosticisme de notre histoire officielle et le laïcisme bétonné de notre État républicain. Car les faits sont là. (…) Les apparitions de l’Île-Bouchard, dont l’Église a permis le culte public et les pèlerinages, s’inscrivent dans la suite merveilleuse des interventions divines sur la France, honorée des titres de “ Fille aînée de l’Église ”, de “ Nation prédestinée ” et de “ tribu de Juda de la Nouvelle Alliance ”. (…)

« Le lundi 8 décembre 1947, j’allai faire une prière à l’église Saint-Gilles en me rendant à l’école à 1 h avec Jeanne, ma sœur, et Nicole, ma cousine», raconte Jacqueline Aubry, douze ans. Jeanne, sa sœur, a sept ans et demi, Nicole dix ans. Les sœurs de l’école leur ont recommandé de prier ce jour-là spécialement pour la France. « On prit de l’eau bénite dans le bénitier, on fit le signe de la Croix et la génuflexion, puis on alla à gauche par la nef. En passant devant la statue de sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus on s’arrêta devant elle et, debout, on récita un “ Je vous salue Marie ”. »

Pieuse coutume instituée par le curé de L’Île-Bouchard, l’abbé Ségelle, dévot et apôtre de la petite Thérèse. N’était-elle pas, depuis le 3 mai 1944, patronne secondaire de la France avec sainte Jeanne d’Arc ?

Précisément, l’histoire locale raconte que Jeanne d’Arc fit halte à L’Île-Bouchard, avant d’arriver à Chinon, le 6 mars 1429. Elle franchit le portail nord de l’église Saint-Gilles, et pria devant le maître-autel.

C’est ainsi que les deux “ saintes de la Patrie ” introduisirent les petites filles auprès de leur Reine.

« Puis, on s’avança jusqu’au fond, devant l’autel de la Sainte Vierge. On s’agenouilla à droite, sur les premiers prie-Dieu et on récita une dizaine de chapelet. Alors je vis tout à coup à ma gauche, entre le vitrail et l’autel, une grande lumière, vive mais non éblouissante, au milieu de laquelle apparut une belle Dame, se tenant dans une grotte et ayant à sa droite un ange. Sous ses pieds, on lisait l’invocation : “ Ô Marie, conçue sans péché, priez pour nous qui avons recours à vous. ” Je poussai du coude Nicole qui était tournée d’un autre côté et je lui dis :

– Regarde donc !

« Nicole regarde ainsi que Jeanne. Elles firent :“ Oh ! ” en mettant leur main droite à leur bouche, puis Nicole s’écria : “ Oh ! la belle Dame ! ”

« Quant à Jeannette, elle fut sidérée par l’Ange :

– Oh ! le beau Ange ! Oh ! le beau Ange ! fit-elle les mains jointes en se relevant. » (…)

« On s’arrêta de prier puis, plutôt effrayées, on sortit de l’église. On aperçut dans la rue Sergine Croizon [treize ans] et sa petite sœur Laura [huit ans et demi] qui allaient à l’école. On leur raconta ce qu’on avait vu et elles rentrèrent avec nous dans l’église pour voir la Dame. »

Les cinq fillettes s’engagent ensemble dans la nef de la Sainte Vierge. Lorsqu’elles sont à la hauteur de la statue de sainte Thérèse, Laura s’écrie : « Je vois une belle Dame et un Ange ! » Mais Sergine, elle, ne voit rien.

Arrivées devant l’autel, elles s’agenouillent devant la belle Dame qui les a attendues. Elles récitent un Notre Père, une dizaine de chapelet et trois fois l’invocationÔ Marie conçue sans péché, priez pour nous qui avons recours à vous. Cette prière terminée, la Dame disparaît, après leur avoir souri à toutes, spécialement à Jeanne Aubry, la plus petite. Alors les enfants se lèvent et vont à l’école.

LE PREMIER RÉCIT

L’école Saint-Gilles était tenue par des religieuses de Sainte-Anne, institutrices et gardes-malades très aimées de la population. Chassées en 1910 par la République, elles étaient revenues, en habit séculier, dès 1911. Le curé de l’époque avait alors consacré l’école à la Sainte Vierge. (…) En arrivant sur la cour de récréation, les enfants racontent à leurs compagnes ce qu’elles ont vu, puis viennent le redire au curé et à sœur Saint-Léon de la Croix, la directrice de l’école. Cette dernière traite Jacqueline de folle et monsieur le Curé lui dit :

« Tu as vu trouble à travers tes grandes lunettes. »

Elle était myope en effet, et portait des lunettes, détail important. Intrigué, le curé se décide cependant à interroger séparément les enfants, en présence de sœur Saint-Léon. Jacqueline raconte :

« J’ai vu une belle Dame vêtue d’une robe blanche, ceinture bleue, voile blanc légèrement brodé autour. Le voile reposait sur le front. Les pieds de la Dame étaient nus et apparents et reposaient sur une pierre rectangulaire formant le bas de la grotte dans laquelle elle nous est apparue. À son bras droit était passé un chapelet aux grains blancs montés sur une chaîne d’or et à l’extrémité duquel était suspendu un beau crucifix en or. Les cheveux étaient blonds et longs et retombaient sur le devant, de chaque côté, en formant deux anglaises. La ceinture bleue était un large ruban et les manches de la robe étaient vagues. À ses pieds, cinq roses, de couleur rose, lumineuses, formaient une guirlande en forme de demi-cercle qui se terminait par deux feuilles vertes reposant sur les deux extrémités de la pierre.

« L’Ange se tenait sur une pierre plate de même couleur que la grotte mais en dehors d’elle, le genou droit à terre, à peu de distance de la Dame et à sa droite. Il était vêtu d’une robe blanche et avait des ailes blanches aux bords dorés. Il tenait à la main droite un lis blanc et l’autre main reposait sur sa poitrine. Les cheveux étaient blonds, en forme d’anglaises. » (…)

Les autres petites filles ayant fait la même description, monsieur le Curé quitte l’école en leur recommandant de rester bien sages. Aussitôt après son départ, Jacqueline s’approche de la sœur directrice et lui dit :

« Ô chère sœur, si vous saviez comme la Sainte Vierge était belle ! »

– Puisqu’elle était si belle, réplique la sœur, si j’avais été à ta place je serais restée à l’église. »

Prenant sa maîtresse au mot, Jacqueline invite ses amies à retourner à l’église, en leur disant :

« Allons voir si elle y est encore ! »

« PRIEZ POUR LA FRANCE. »

À peine les enfants sont-elles à genoux devant l’autel de la Sainte Vierge, que la belle Dame, accompagnée de l’Ange, se montre de nouveau à elles.

Prenant la parole pour la première fois, avec une expression d’indicible tristesse, elle leur dit :

« Dites aux petits enfants de prier pour la France, car elle en a grand besoin. »

La Dame a insisté sur le mot “ France ”. Poussées par Jacqueline, les deux plus petites demandent :

« Madame, êtes-vous notre Maman du Ciel ? »

Le visage de la Dame s’éclaire d’un sourire, et elle répond d’une voix douce et lente :

– Oui, je suis votre Maman du Ciel. »

En prononçant le mot “ Ciel ”, la Sainte Vierge a tourné ses yeux bleus très purs vers le Ciel. Jacqueline s’enhardit et demande elle-même à la Dame :

« Quel est l’Ange qui vous accompagne ?

L’Ange se détourne et répond en souriant :

– Je suis l’ange Gabriel. »

Ce furent les seules paroles prononcées par l’Ange à l’adresse des enfants, pendant toutes les apparitions. Puis la Dame tend la main droite et dit :

« Donnez-moi votre main à embrasser, chacune à votre tour. »

Elles approchent sans crainte et la Dame, se penchant, prend lentement leur main droite, l’embrasse sur sa face dorsale, à l’extrémité de l’index, du médius et de l’annulaire et leur dit en les congédiant :

« Revenez ce soir à 5 heures et demain à 1 heure. »

Alors la vision disparaît et les enfants retournent à l’école. Elles remarquent que la trace du baiser de la Dame est restée sur leurs mains et se signale par un ovale blanc. « Dépêchons-nous, dit Jacqueline, la chère sœur sera bien obligée de nous croire, cette fois-ci. » Malheureusement, la trace disparaît à la sortie de l’église pour l’une, à la porte de l’école pour les autres.

DESCENDUE DU CIEL AVEC SON CORPS

Nous étions en 1947. Le pape Pie XII se préparait à définir solennellement le dogme de l’Assomption de la Très Sainte Vierge, montée au Ciel avec son corps. Comme c’était un sujet d’ardentes controverses dans l’Église, le Pape allait devoir faire appel à son magistère solennel et infaillible. Eh bien ! à L’Île-Bouchard, la Reine du Ciel a voulu manifester d’avance la vérité du dogme, qui sera défini le 1er novembre 1950. En embrassant la main des enfants, et en y laissant une trace sensible de son baiser, la Sainte Vierge a voulu faire comme Jésus, son Fils, avec Thomas l’incrédule : Donne ta main et mets-la dans mon côté… (…)

LA DAME EST REVENUE ET NOUS REGARDE

Lorsque les enfants arrivent à l’école, la sœur directrice demande aux petites d’où elles viennent :

« Nous venons de l’église, répond Jacqueline, vous nous avez dit que nous aurions dû y rester.

– C’est bien, et qu’avez-vous vu ? »

Les fillettes relatent ce qu’elles ont vu et rapportent les paroles de la Dame. Plus troublée qu’elle ne veut le paraître, sœur Saint-Léon demande à 16 heures à Jacqueline et à Nicole de lui raconter, séparément et par écrit, ce qu’elles ont vu et entendu lors des deux apparitions au début de l’après-midi. Les deux copies relatent les mêmes choses, avec les mêmes détails.

Au soir du 8 décembre à 17 heures, un salut du Saint-Sacrement, précédé du chapelet, est donné dans l’église Saint-Gilles. Seule Jacqueline est présente. Pendant la cinquième dizaine, l’enfant manifeste une inquiétude évidente, tournant la tête à droite, à gauche, semblant chercher quelqu’un.

Enfin, quoique cela soit défendu, elle retourne la tête et, de ses yeux suppliants, fixe ceux de sœur Saint-Léon de la Croix comme pour demander quelque chose. La sœur lui fait signe de se retourner vers l’autel. Jacqueline obéit aussitôt. C’est d’ailleurs le début du Salut, et la belle Dame, car c’est elle ! disparaît alors, s’effaçant au moment où le curé apporte le Saint-Sacrement sur l’autel de la Sainte Vierge.

Après la bénédiction, lorsque le curé rapporte le bon Dieu au maître-autel et qu’on entonne le chant : “ Ô Marie ! conçue sans péché, priez pour la France ”, la Dame et l’ange réapparaissent dans la lumière. Sœur Saint-Léon, après avoir congédié les autres enfants, s’approche de Jacqueline qui lui dit :

« Chère sœur, la Dame est revenue, elle est là, elle nous regarde ; que faut-il faire ?

– Mais, où est-elle ? demande la sœur décontenancée.

– Voyons, vous la voyez bien, chère sœur, elle est là. »

La sœur conseille alors à Jacqueline de réciter avec elle son chapelet et s’agenouille près d’elle. « Alors je puis dire que c’est la seule fois où j’ai vu la Sainte Vierge tant sourire, racontera Jacqueline. Devant la chère sœur qui avait peur, mais qui avait peur ! elle souriait. »

Lorsque la dizaine est terminée, Jacqueline dit :

« Elle est partie !

– Ouf ! » fait la sœur Saint-Léon, qui s’empresse d’aller tout raconter au curé.

Le fait que la Dame ait disparu juste au moment où le Saint-Sacrement était apporté dans sa chapelle frappa le bon abbé Ségelle. « Ce soir, monsieur le Curé commença à être touché,racontera Jacqueline. Il fut frappé par le fait que la Sainte Vierge avait disparu au moment où il avait apporté le Saint-Sacrement. La Sainte Vierge s’était effacée pour laisser la place à son Fils. Il se disait : “ Une enfant ne peut pas inventer cela. ” » (…)

POUR LA FRANCE EN GRAND DANGER

Le mardi 9 décembre 1947, les quatre fillettes essuient les rebuffades des grandes personnes auxquelles elles racontent leurs visions.

« Que me racontes-tu là ?…

– Tu es folle !…

– Tu es une sotte !…

– Cesse de me raconter de telles histoires ! »

« Croyez-y pas si vous voulez, moi z’ai vu, z’y crois », répond invariablement Jeannette Aubry. Sa mère, pourtant, lui interdira ce jour-là d’aller à l’église après la classe, pour voir la Dame :

« Je te le défends ! C’est pas la Sainte Vierge que tu vois, c’est le diable. Si tu retournes à l’église à 5 heures, la belle Dame, comme tu dis, t’emmènera et tu ne me verras plus. » Comme à Fatima ! où le curé disait que c’était peut-être le diable.

À 1 heure de l’après-midi, les voyantes se placent, comme la veille, devant l’autel de la Sainte Vierge, et commencent le chapelet. Bientôt la lumière apparaît, « un globe de lumière » s’ouvre et un rideau argenté se déploie, couvrant la moitié du vitrail de gauche et la moitié de l’autel de Notre-Dame des Victoires. Sur ce fond de rideau se détache une grotte et, dans cette grotte, la Dame. À quelque distance, sous une voûte de rocher, l’Ange, à gauche de la Dame, cette fois.

Sous les pieds de la Dame, l’invocation de la veille : “ Ô Marie conçue sans péché… ” a été remplacée par ces mots : “ Je suis l’Immaculée Conception ”. Des lettres brillantes, en partie cachées par les mains de la Dame, apparaissent sur sa poitrine : MA … CAT.

Les voyantes sont seules dans l’église. Trois amies les attendent dehors. Jacqueline a promis de demander à la Dame si elles pouvaient entrer. Elle le fait.

« Oui, répond la Dame, mais elles ne me verront pas. »

Jacqueline s’empresse d’aller le dire à ses amies. Une femme du village, madame Trinson, survenue sur les entrefaites, se joint aux enfants et pénètre avec elles dans l’église.

Dès le retour de Jacqueline, la Dame levant sa main droite à la hauteur de sa joue, fait signe de l’index d’approcher. Quand les quatre fillettes sont près d’elle, elle les invite à s’approcher d’elle :

« Embrassez la croix de mon chapelet. »

Jacqueline et Nicole, en se haussant sur la pointe des pieds, parviennent à atteindre le crucifix que la Dame tient dans sa main, mais Laura et Jeannette, trop petites, doivent être soulevées à bout de bras par Jacqueline. Ce que celle-ci fait sans aucun effort.

Lorsqu’elles ont, toutes les quatre, baisé le crucifix d’or, elles font très, très lentement, le signe de Croix, à l’imitation de Celle qui vient de les unir d’une manière si simple mais très intime à sa compassion. « Qu’il est impressionnant ce signe de la croix ! » diront-elles.

Puis la Dame, devenue subitement toute triste, dit :

« Je vais vous dire un secret que vous pourrez redire dans trois jours : Priez pour la France qui, ces jours-ci, est en grand danger. » (…)

Puis la Dame continue :

« Allez dire à monsieur le Curé de venir à 2 heures, d’amener les enfants et la foule pour prier. »

Jacqueline se retourne alors vers madame Trinson, et les trois amies, et leur dit :

« La Sainte Vierge demande la foule. Où donc la prendre ?

Madame Trinson, très émue, lui répond :

– Ne te tourmente pas, ces petites et moi la commençons. »

UNE ÉCOLE DE PRIÈRE

Alors madame Trinson, les trois fillettes et les voyantes récitent deux Ave Maria et l’invocation “ Ô Marie conçue sans péché, priez pour nous qui avons recours à vous. ” La Dame et l’Ange se sont associés à leur prière jusqu’à ces paroles : “ Sainte Marie, Mère de Dieu… ” exclusivement, les laissant dire seules la deuxième partie de l’Ave Maria.

Aussitôt après, la Dame, redevenue souriante, prend la parole :

« Dites à monsieur le Curé de construire une grotte le plus tôt possible, là où je suis, d’y placer ma statue et celle de l’Ange à côté. Lorsqu’elle sera faite, je la bénirai. »

Et elle disparaît. La vision a duré de huit à dix minutes. Quand le curé apprend que la Dame demande qu’on revienne à l’église à 2 heures, il s’impatiente : « 2 heures ! C’est l’heure de la classe. Qu’elles aillent en classe et qu’elles obéissent à leurs maîtresses ! » Jacqueline revient en pleurs à l’école.

« Sœur Marie de l’Enfant-Jésus, raconte-t-elle, me demande pourquoi je pleure. Je lui raconte les faits. Elle me dit la même chose que monsieur le Curé : il faut obéir. Je lui rétorque : “ Mais la Sainte Vierge est au-dessus de monsieur le Curé, il faut lui obéir. ” La sœur me regarde toute triste. » Rien n’y fait, et il faut attendre la fin de la classe pour retourner à l’église.

Une quarantaine de personnes y sont déjà, adultes et enfants confondus. Au bout d’une dizaine de chapelet, la Dame apparaît et organise elle-même la prière :

« Chantez le “ Je vous salue, Marie”, ce cantique que j’aime bien. »

Elle aime bien ce cantique, parce qu’il se termine par une prière pour la France, comme à Pontmain, où elle ne pouvait cacher sa joie d’entendre le beau cantique “ Mère de l’espérance ”, qui lui rappelle que la France lui a été consacrée par « un de nos souverains ».

Le cantique terminé, elle reprend :

« Je veux que les personnes qui sont dans l’église s’approchent de moi et prient avec vous. »

Tous se regroupent pour continuer le chapelet. À la fin, la Dame commence elle-même l’invocation :

« Ô Marie conçue sans péché…

Et les enfants, suivis par les assistants, reprennent :

– Priez pour nous qui avons recours à vous. »

À la fin, la belle Dame trace un grand signe de croix, fixant son regard sur chacun.

Il est vraiment touchant de voir la Sainte Vierge organiser elle-même les chants et la prière de ses enfants, comme une bonne mère ou une maîtresse d’école, soucieuse de montrer l’exemple pour bien enseigner. Elle a inauguré là une véritable “ école de la prière ”, « l’œuvre la plus malaisée dans un temps où l’irréligion domine les sociétés » (article 116 de notre sainte Règle des Petits frères du Sacré-Cœur).

Et cette prière ne laisse pas d’être efficace.

LE JOUR OU LA GRÈVE RECULA

Ce même 9 décembre, à la stupéfaction générale, le Comité national de grève de Paris donnait l’ordre de reprendre le travail. Le revirement fut aussi brusque qu’imprévu. La veille encore, on exhortait les grévistes à « tenir et vaincre », puis brusquement, sans les consulter, l’ordre était donné de cesser la grève. (…)

Pour nous, nous n’hésitons pas à voir dans la conjonction des événements surnaturels de L’Île-Bouchard avec la fin de la grève générale la marque d’une intervention déterminante de la Sainte Vierge, ce qui n’exclut pas qu’elle se soit servi de causes secondes.

UN SECRET POUR LA FRANCE

Le mercredi 10 décembre, la nouvelle s’est répandue dans les environs. Il y a près de cent cinquante personnes dans l’église. Sur le coup de 13 heures, les fillettes se lèvent toutes les quatre ensembles :

« La voilà ! »

Notre-Dame leur demande de chanter le “ Je vous salue Marie ”. Ce qu’elles font sur un air propre à la paroisse. Puis elles récitent une dizaine de chapelet, suivie de l’invocation “ Ô Marie conçue sans péché… ”

Alors la Dame leur fait signe avec l’index droit de s’approcher et, se penchant, leur dit :

« Baisez ma main ! »

Les enfants, s’étant avancées vers le coin gauche de l’autel, embrassent la main tendue. Jacqueline soulève sans effort, comme la veille, Laura et Jeannette trop petites. Puis Nicole demande :

« En quoi faut-il faire la grotte que vous nous avez demandée hier ?

– En papier pour commencer. »

Sur les instances de sa mère, Jacqueline demande :

« Madame, voulez-vous faire un miracle pour que tout le monde croie ?

– Je ne suis pas venue ici pour faire des miracles, mais pour vous dire de prier pour la Francequi, ces jours-ci, est en grand danger. Mais demain vous y verrez clair et ne porterez plus de lunettes. »

L’enfant, atteinte d’une myopie légère compliquée de strabisme et d’astigmatisme, souffrait de conjonctivite depuis deux ans.

La Dame, prenant un air grave, continue :

« Je vais vous confier un secret que vous ne direz à personne.

– Nous vous le promettons ! » répondent les enfants en chœur.

La confidence est brève. C’est la même pour tous. Nous n’en saurons rien de plus. Ce secret, les voyantes l’ont gardé strictement. Cependant, après les événements de mai 1968 en France, elles se concertèrent et furent d’accord, au vu de la nouvelle situation critique où se trouvait plongé le pays, de le communiquer à l’archevêque de Tours. Ce qui fut fait le 1er juin 1968. (…)

La Dame leur dit ensuite :

« Revenez demain à 1 heure. »

Les voyantes le promettent. Alors la Dame disparaît dans un nuage de poussière d’or. Le voile d’argent se replie en forme de boule, laquelle s’enfonce dans le mur. Les enfants se signent et se lèvent. L’apparition a duré environ un quart d’heure.

« IL Y AURA DU BONHEUR DANS LES FAMILLES. »

En se réveillant, le jeudi 11 décembre, Jacqueline s’aperçoit que ses yeux ne sont pas collés comme à l’ordinaire, et qu’elle voit parfaitement bien sans lunettes. « Comme tous les matins, raconte-t-elle, Maman monte de l’eau bouillie pour me décoller les yeux, mais ce matin, je n’ai plus les yeux collés, plus de croûtes, plus d’humeur… et je vois au loin, je n’ai plus besoin de lunettes. Maman appelle Papa et, devant un tel miracle, ils pleurent et disent merci. On me donne un journal à lire. Papa court chercher monsieur le Curé. En voyant mes yeux guéris, il s’agenouille et pleure. Les voisins sont ahuris et émus, car depuis ma plus jeune enfance, je leur faisais pitié. »

À 1 heure de l’après-midi, il y a environ deux cents personnes dans l’église Saint-Gilles. Les quatre fillettes arrivent et, ne trouvant aucune place libre sur les prie-Dieu, elles viennent s’agenouiller devant la Sainte Table, face à l’autel de la Sainte Vierge. Elles ne paraissent nullement impressionnées. Monsieur le Curé, agenouillé sur une marche du grand autel, côté Évangile, assiste pour la première fois aux apparitions, ainsi que les trois religieuses de Sainte-Anne.

Dès que les fillettes sont agenouillées, l’apparition se manifeste de nouveau suivant le mode habituel. La Dame qui, de jour en jour, apparaît de plus en plus belle, sourit et prend aussitôt la parole :

« Chantez le “ Je vous salue Marie ”. »

Les quatre enfants chantent le “ Je vous salue Marie ”. Puis, sur un signe de la Dame, elles prennent leur chapelet et récitent dix Ave suivis de l’invocation. Sur un signe de monsieur le Curé, Jacqueline prend le papier que lui a remis sœur Saint-Léon et lit les questions qui y sont écrites.

« D’où nous vient cet honneur que vous veniez dans l’église Saint-Gilles ?

– C’est parce qu’il y a ici des personnes pieuses et que Jeanne Delanoue y est passée. »

Jeanne Delanoue, fondatrice des Sœurs de Sainte-Anne de la Providence (1666-1736), appelée “ la Mère des pauvres ”, venait d’être reconnue bienheureuse un mois auparavant (le 9 novembre 1947). Il suffit donc, pour attirer les bénédictions du Ciel, de la piété de quelques personnes et du passage d’un saint ? L’enfant aurait pu s’arrêter là et ne pas poser la question suivante puisqu’elle a déjà une réponse qui la résout, mais, par souci d’obéissance, elle continue :

« Est-ce en souvenir de Jeanne Delanoue qui vous aimait tant, qui aimait tant vous prier à Notre-Dame des Ardilliers…

– Oui, je le sais très bien !

– … et qui est venue elle-même établir ses filles ici ? »

La Dame, qui a déjà répondu à cette question, se contente de demander :

« Combien y a-t-il de sœurs ici ?

– Elles sont trois.

– Quel est le nom de leur fondatrice ?

Les quatre voix n’en font qu’une qui s’élève, forte et si bien timbrée qu’elle emplit l’église :

– Jeanne Delanoue ! »

On dirait une leçon de catéchisme, avec questions-réponses ! Les enfants contemplent quelques instants la Dame qui les regarde, puis Jacqueline prend de nouveau la parole :

« Madame, voulez-vous guérir les personnes qui souffrent de rhumatismes, de maladies nerveuses, qui souffrent physiquement et moralement ? »

« Il y aura du bonheur dans les familles, répond la Dame, qui ajoute : Chantez maintenant le “ Je vous salue Marie ”. »

Les enfants s’exécutent aussitôt. Le chant terminé, le dialogue continue entre la Dame et les voyantes :

« Est-ce que monsieur le Curé va construire la grotte ?

– Oui, Madame.

– Priez-vous pour les pécheurs ? Il faut prier beaucoup pour les pécheurs.

– Oui, Madame, nous vous le promettons.

– Revenez demain à 1 heure.

– Oui, Madame, nous reviendrons demain.

– Ô Marie conçue sans péché…

– Priez pour nous qui avons recours à vous ! »

La Dame bénit alors lentement la foule qui se trouve dans l’église. Les enfants font le signe de la Croix. La Dame et l’Ange disparaissent comme de coutume. L’apparition a duré un quart d’heure.

Ce soir-là, Jacqueline voit arriver chez ses parents deux gendarmes de l’Île-Bouchard. L’un d’eux, pour l’effrayer, lui défend de retourner à l’église. L’enfant répond sans s’émouvoir : « Monsieur, si vous voyiez ce que j’y vois, vous y retourneriez. »

Et madame Aubry d’ajouter : « Elle a commencé d’y aller, elle y retournera jusqu’au bout. »

« PRIEZ BEAUCOUP POUR LES PÉCHEURS. »

Le vendredi 12 décembre, dès midi, la foule envahit l’église. Chacun veut être au premier rang : chaises, bancs, tout est plein. On compte alors de trois cents à quatre cents personnes.

À 13 heures, les quatre fillettes viennent s’agenouiller, coude à coude, devant l’autel de la Sainte Vierge et, aussitôt, leur maintien prouve à l’assistance que l’apparition se manifeste de nouveau à elles. La Dame est plus radieuse que jamais. Sa tête est auréolée de rayons lumineux vivement colorés, bleus, rouges, jaunes, verts, rosés, orange. Comme à Fatima. Les enfants nommeront cette auréole “ arc-en-ciel ”. Le mot MAGNIFICAT apparaît en entier en lettres d’or sur sa poitrine, car elle a baissé les mains.

Se reproduit alors le même rituel de dévotion liturgique dirigé par la belle Dame : le “ Je vous salue Marie ”, les invocations, le baisemain, important !

« Priez-vous pour les pécheurs ? demande la voix.

– Oui, Madame, nous prions.

– Bien. Surtout, priez beaucoup pour les pécheurs. »

Alors les enfants prennent leur chapelet et récitent, avec la Dame et l’Ange, dix Ave Maria suivis de l’invocation “ Ô Marie conçue sans péché… ”

Lorsque la prière est achevée, Jacqueline, désignant une jeune fille paralytique du village proche de Saint-Épain qu’on a apportée sur une civière, demande :

« Madame, voulez-vous guérir cette jeune fille ?

– Si je ne la guéris pas ici, je la guérirai ailleurs, répond la Dame.

– Ô Madame, reprend Jacqueline, voulez-vous guérir une personne très pieuse ?

Comme la Dame ne répond pas, elle continue naïvement :

– Elle demeure à Angers.

– Je ne suis pas venue, dit enfin la Dame redevenue toute triste, pour faire des miracles mais pour que vous priiez pour la France qui est en grand danger, ces jours-ci. »

Alors la Dame trace un lent signe de Croix sur la foule et les enfants se signent. Puis l’apparition disparaît. Les enfants, après s’être de nouveau signées, se lèvent et sortent de l’église. Quelle simplicité !

Ce 12 décembre marquait la fin définitive de la grève et la reprise du travail sur l’ensemble du territoire. D’où l’apparition du mot complet “ Magnificat ”.

PAS DE NOTRE PÈRE ?

Le samedi 13 décembre, dès midi, la foule arrive à pleines rues vers l’église et s’y engouffre. Environ cinq cents personnes remplissent le sanctuaire. Un peu avant 13 heures, les enfants arrivent. Puis la Sainte Vierge, qui prend l’initiative de la prière :

« Chantez le “ Je vous salue Marie”. »

Les enfants chantent, « pour faire plaisir à la Dame », puis la Dame leur fait signe de réciter leur chapelet.

« Commencez tout de suite par les “ Je vous salue Marie”», dit-elle.

Et le Notre Père ? Pas de Notre Père! Comme si la Sainte Vierge prenait la place du Bon Dieu ! Mais, précisément, c’est cela. Comme à La Salette en 1846, cent ans auparavant ; (…) l’explication viendra à Fatima, lorsque Notre-Dame dira que c’est la volonté de Dieu qu’elle passe devant et que tout lui soit soumis.

Les enfants récitent dix Ave suivis de l’invocation, et interrogent la Dame du regard pour savoir s’il faut s’arrêter, mais elle leur dit :

« Continuez les “ Je vous salue Marie”. »

C’est ainsi qu’elles récitent cinq dizaines d’Ave, sans Pater ni Gloria, mais entrecoupés à chaque dizaine par l’invocation “ Ô Marie conçue sans péché… ”

Puis Nicole Robin, sur le désir de sœur Saint-Léon de la Croix, demande tout bas :

« Madame, quand on fera la grotte, faudra-t-il laisser l’autel qui est à côté ?

– Oui, laissez l’autel à côté. »

Jacqueline qui a dans sa main une gerbe d’œillets, offerte par une personne de la paroisse pour être présentée à la Dame, dit :

« Madame, je vous offre ces fleurs.

La Dame bénit les fleurs et Jacqueline murmure :

– Oh ! merci.

La Dame demande alors :

– Est-ce que vous me construirez une grotte ?

– Oui, Madame, nous vous la construirons.

La Dame sourit à cette réponse et dit :

– Je reviendrai demain pour la dernière fois. »

Sur ces mots, elle disparaît. L’apparition a duré vingt-cinq minutes. Si la Sainte Vierge insiste tant pour avoir “ sa ” grotte, c’est peut-être parce qu’elle sait que les hommes sont lents à satisfaire ses demandes : la statue de la Vierge au globe et l’ouverture de la chapelle de la rue du Bac, la dévotion des cinq premiers samedis du mois à Fatima…

MAGNIFICAT !

Dimanche 14 décembre. Dès la fin de la grand-messe, la foule envahit l’église. Plusieurs familles qui ont assisté à la messe ne retournent pas chez elles pour déjeuner, de peur de ne plus trouver ensuite de place.

La foule grossit de plus en plus. Bientôt il n’y a plus une place à prendre, bien qu’on ait enlevé une partie des chaises. La chaire, la tribune, sont pleines. Des grappes humaines s’attachent, s’accrochent aux piliers de l’église. Des échafaudages les plus hétéroclites s’élèvent, des gens apportent des échelles doubles qui sont aussitôt garnies jusqu’au faîte. Il y a là plus de deux mille personnes, sans compter celles qui n’ont pu entrer. Toute cette foule est néanmoins disciplinée et récite, sans interruption, quatre chapelets.

Peu avant 13 heures, les quatre fillettes, les bras chargés de fleurs magnifiques, s’avancent, non sans peine, jusqu’à l’autel de la Sainte Vierge et s’agenouillent, séparées les unes des autres. Bientôt l’apparition se manifeste, plus belle que jamais. La récitation du chapelet par les voyantes, à l’initiative de la Dame, sera ponctuée à chaque dizaine d’une parole significative de la Sainte Vierge. Ainsi, après la première dizaine, Jacqueline lit un papier préparé par le Curé :

« Madame, nous vous demandons de bénir Monseigneur l’Archevêque, ses vingt-cinq années d’épiscopat, Mgr l’Évêque de Blois, les deux paroisses, les écoles libres, la mission du Carême, les prêtres du doyenné et de donner des prêtres à la Touraine. »

Déjà la lancinante question des vocations ! La Dame regarde les enfants, et eux la regardent en silence, puis la Dame incline la tête en signe d’assentiment.

Alors, les fillettes se lèvent et, sans quitter leurs places, offrent les fleurs qu’elles portent sur leurs bras.

« Madame, nous vous offrons ces fleurs. »

La Dame est souriante mais ne répond rien. Alors Jacqueline insiste : « Prenez-les. »

Nouveau silence. La Dame continue de sourire.

« Embrassez-les, supplie Jacqueline. Alors la Dame répond enfin :

– Je les embrasserai mais je ne veux pas les prendre. Vous les emporterez. »

Et la Dame leur ayant fait signe d’approcher, les enfants viennent à ses pieds et Jacqueline présente successivement sa gerbe de fleurs et celles des trois autres fillettes. La Dame embrasse les fleurs et dit :

« Continuez le chapelet. »

Les enfants reviennent à leurs places et récitent la seconde dizaine. La Dame et l’ange s’unissent à la prière jusqu’aux mots : “ Sainte Marie… ” Jacqueline sort alors un second papier, préparé par une sœur :

« Madame, que faut-il faire pour consoler Notre-Seigneur de la peine que lui causent les pécheurs ?

– Il faut prier et faire des sacrifices. »

La troisième dizaine est suivie des invocations.

« Ô Madame, demande Jacqueline, je vous en supplie, donnez-nous une preuve de votre présence !

– Avant de partir, j’enverrai un vif rayon de soleil, répond la Dame, qui ajoute : Dites à la foule qu’elle chante le Magnificat. »

Pendant ce chant, la beauté de la Sainte Vierge tournant les yeux vers le Ciel est telle, qu’elle ravit à jamais le cœur des enfants. Elle a de quoi être heureuse : le danger que courait la France est écarté, sa prière a été exaucée. Le chapelet reprend. À la fin de la quatrième dizaine, la Dame demande qu’on lui chante encore le “ Je vous salue Marie ”. Puis, elle ajoute :

« Priez-vous pour les pécheurs ?

– Oui, répondent les quatre enfants ensemble.

– Récitez une dizaine de chapelet les bras en croix ! »

Alors, avec un ensemble parfait, les enfants mettent leurs bras en croix. Sans hésitation ni respect humain, la foule fait de même. Beaucoup n’avaient pas prié depuis de nombreuses années et certains ont des larmes dans les yeux. La cinquième dizaine achevée, la Dame dit :

« Allez-vous construire la grotte ?

– Oui, oui, nous allons la construire. »

LA SIGNATURE DE L’IMMACULÉE

Pendant le dernier chant du “ Je vous salue Marie ”, que termine l’invocation “ Ô Marie conçue sans péché, priez, priez pour la France ”, un rayon de soleil, perçant un ciel nuageux très bas, a pénétré par une verrière, au sud de l’église, et se projette obliquement et progressivement, en éventail, sur l’apparition et sur les quatre enfants dont les visages sont transfigurés. Les fleurs qu’elles tiennent à la main semblent recouvertes de diamants. Le phénomène est inexplicable.

Pour qui serait encore sceptique, ce rayon de soleil miraculeux est la signature de l’Immaculée Conception si l’on se souvient que déjà, le 8 décembre 1854, lors de la définition du dogme de l’Immaculée Conception par le pape Pie IX, le Ciel s’était manifesté de la même manière au Souverain Pontife. Au moment de prononcer les paroles de la définition, la voix de Pie IX se trouva soudain mystérieusement affermie et amplifiée, au point de résonner dans toute la basilique Saint-Pierre. Au même instant, tandis qu’il avait plu jusqu’alors abondamment, le ciel se découvrit et un rayon de lumière vint illuminer le Pontife.

Comme à Fatima, mais d’une manière beaucoup plus modeste, les apparitions de L’Île-Bouchard se terminent par un miracle solaire.

Le chant terminé, la Dame bénit lentement la foule. Inclinées, les enfants se signent. La Dame et l’Ange disparaissent. Le voile d’argent se replie en forme de boule, et la boule toute resplendissante sous la lumière du mystérieux rayon de soleil rentre dans le mur. Bientôt, le rayon de soleil disparaît à son tour. Monsieur le Curé, sortant de sa réserve habituelle, monte sur les marches de l’autel et dit à la foule que « ce rayon de soleil est un rayon envoyé par la Sainte Vierge ».

Les fruits ne se firent pas attendre dans la paroisse : « C’est avec joie que le Curé constate un retour à la pratique religieuse. Beaucoup de paroissiens qui n’avaient pas mis les pieds à l’église depuis de nombreuses années revenaient aux sacrements. Les prêtres du canton remarquent la même chose. »

Mais surtout, la menace d’une guerre civile suscitée par les “ erreurs de la Russie ” fut, durant cette semaine du 8 au 14 décembre 1947, définitivement écartée. Les historiens datent de cette fin d’année 1947 le commencement du déclin du parti communiste français, et parle des mois qui suivirent comme d’un « moment de grâce et de détente, dans le destin tourmenté du régime ». Peut-être aussi comme un avant-goût du « certain temps de paix » promis à Fatima.

Extraits de Il est ressuscité ! n° 41, déc. 2005, p. 23-32

Méconnaissance, impiété ou blasphème ?

Avons-nous le droit de priver délibérément notre église de ses saints et de son porte-cierges, de surcroît un vendredi soir de chapelet, en plein mois de Consécration à Marie ? C’est ce qu’un groupe de croyants a découvert dans une petite église de Saône et Loire ce mois de mai 2019.

Des gens et leur grossièreté

Les futurs mariés et leurs familles ont jugé opportun, pour préparer leur cérémonie, d’enlever les statues, dont Notre Dame de Lourdes, saint Joseph, saint curé d’Ars… ces statues trônaient autour des marches de l’autel. Les mariés entendent ainsi utiliser l’église pour recevoir LE sacrement mais choisissent leur décorum : parce qu’il fallait ne rien regarder autour ? Ne voir que les époux et les jolis bouquets déposés pour transformer l’endroit en simple salle des fêtes ?

Comment cautionner cela ?

Les autorités du lieu se sont-elles manifestées ? Aucunement,  mondanités obligent ! Aucune excuse n’est recevable alors que le discernement devrait rester premier, ainsi que veille et garde, par prudence. Si personne ne protège le trésor de l’Eglise, que les voix des plus simples s’élèvent alors !

Nous avons le devoir de dénoncer ces offenses. Les églises de nos villages n’incitent pas à leur fréquentation quand elles sont froides, poussiéreuses, abîmées, avec des bancs cassés. Quelques croyants et élus responsables font ce travail d’entretien et de sauvegarde de nos clochers et voici en retour comment s’exprime la gratitude des « gens bien » : indifférence et mépris.

Prions Notre Dame et son VRAI chemin de foi.

Une petite voix

Perles de culture n°194

Anne Brassié reçoit Philippe Maxence, rédacteur en chef de L’Homme Nouveau, pour son hommage à Alexandre Soljenitsyne. Et avec l’aide de Stéphanie Bignon, Yves de Fromentel nous présente le domaine de Beaulieu, son château et sa ferme modèle, en grave danger d’être vendu.

 

 

 

Fumier !

 

Il était une fois un jeune couple désireux de s’installer dans la belle province de Normandie, afin d’y couler des jours heureux et d’y fonder une famille. A l’hiver 2017, ils trouvent enfin la maison de leurs rêves : une ferme datant de 1829, sise sur près de treize hectares de terres. Que demander de mieux ?
Au printemps suivant, ils peuvent enfin emménager ! Bien vite, les cartons sont déballés, les meubles assemblés, la vaisselle rangée : il est alors temps de se mettre au travail… dans le jardin et dans les prés. Treize hectares, c’est beaucoup pour deux chevaux et un poney, appartenant aux nouveaux propriétaires. L’idée de louer les prés à d’autres cavaliers en mal de pâtures pour leurs montures germe alors dans l’esprit du jeune couple. Aussitôt dit, aussitôt fait : les clôtures sont réparées, et les abreuvoirs nettoyés. Les premiers clients se présentent alors, timides, étonnés de retrouver de la vie dans ce haras aux prés dormant depuis de nombreuses années.
Afin d’accroître la visibilité de leur pension de chevaux, le jeune couple demande une inspection sanitaire des lieux, nécessaire pour recevoir l’agrément de la Fédération Française d’Équitation (FFE). Au moment de l’inspection, tous les signaux sont au vert, sauf un : la fumière ! En effet, ce lieu où le crottin des chevaux passant la nuit au box est entreposé n’est pas aux normes : il devrait posséder une dalle en béton et être mieux isolé, afin de ne pas contaminer les sols. L’écologie, Messieurs dames ! Pensez à vos enfants : souhaitez vous leur léguer une terre acide, stérile, polluée ?
Bien sûr que non Monsieur l’inspecteur ! Mais laissez nous vous expliquer ce qu’est véritablement l’écologie… Cette fumière est encadrée de palissades en bois auxquelles est accolé notre poulailler. La décomposition du fumier, grâce à des millions de bactéries et d’insectes provenant du sol dont vous voulez nous couper par du béton, dégage une chaleur de 70 degrés. Le bois étant une matière naturelle perméable, il laisse passer cette chaleur à l’intérieur du poulailler où nos cocottes vivent confortablement et pondent quotidiennement toute l’année, même en plein hiver lorsque les température dégringolent en dessous de zéro. Ainsi, nous consommons des œufs frais n’ayant pas nécessité de transport routier ni de conditionnement plastique, ce qui réduit d’autant notre emprunte carbone.
Et puis, Monsieur l’inspecteur, regardez notre potager, nos courgettes énormes, nos concombres innombrables, nos tomates géantes. Ce festival de légumes pousse les pieds dans le fumier. Nous le transportons chaque automne et l’épandons en couche épaisse sur nos zones de culture afin de les enrichir. Cet engrais naturel est un véritable or noir : il amende les sols en leur apportant de la matière organique et nourrit de nombreux insectes – notamment des vers de terre – qui, en le décomposant, aèrent et ameublissent le sous-sol. Ce n’est pas un hasard si le coq français chante les pieds dans le fumier : c’est qu’il sait reconnaître sa richesse nourricière !
Non. Monsieur l’inspecteur n’est pas d’accord : il est là pour faire appliquer un règlement et, dans ce règlement, il est dit que le fumier pollue, qu’il faut l’isoler des sols et l’évacuer à force de camions ; il n’y est pas dit que l’on peut créer une organisation circulaire où les déchets des uns créent la nourriture des autres, sans produit de synthèse, sans émission de dioxyde de carbone, et sans déperdition d’énergie.
Le jeune couple remercie alors l’inspecteur pour ce cours d’écologie politique et décide de rester fidèle à l’écologie naturelle : ils se passeront bien de label ! Un an plus tard, leur pension de
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chevaux est remplie : quatorze équidés s’ébattent dans leurs prés et produisent des crottins qui continuent d’alimenter la fumière, pour le plus grand bien des poules et du potager.

HRC.

Paysannerie : disparition programmée ?

Sur Radio Courtoisie, Rémi Bonnevialle, assisté de Jacqueline Loevenbruck, reçoit :
◾Dominique Florian, directrice de l’IRABE
◾Pierre Hinard, ingénieur agronome, éleveur et agriculteur
◾Notre ami, Yves de Fromentel, éleveur et agriculteur
◾Pierre Benard, professeur de littérature, écrivain
◾Eric Hamers, diamantaire, maître d’art, meilleur ouvrier de France