Mes poules et leur coq vivent en liberté le jour et la nuit ils se protègent dans le poulailler. Le risque de me faire prendre des volailles par le renard en journée est très élevé surtout au printemps.
Cependant l’ouverture matinale du poulailler provoque toujours la même excitation et le même empressement chez mes gallinacés. Comme si la vie ne valait d’être vécue qu’en liberté… au risque de la perdre. La liberté sans le risque n’existe pas et la vie sans la liberté ne vaut rien, m’enseignent mes poules. Notre choix aujourd’hui, plus crucial que jamais, se situe là : sortons-nous du poulailler ou pas ? Acceptons-nous le prix de la liberté ? Et ne pas l’accepter nous protège-t-il de mourir ? Certains voudraient nous faire croire que rester dans le poulailler est le gage de la sécurité, d’une vie paisible et sans risque de mourir.
Lors de l’épidémie de grippe aviaire (H1N1) en 2009, nos poules devaient rester confinées ou… être abattues. Beaucoup d’entre nous ont abattu leur basse-cour sous les menaces de sanctions financières. Je me souviens avoir refusé ces brimades et bravé les interdits en annonçant que si nous acceptions, bientôt c’est nous que nous confinerions sous les mêmes prétextes fallacieux… J’étais cependant loin d’imaginer qu’ils oseraient et surtout que nous accepterions !
Onze ans plus tard… au mieux l’homme est traité comme un animal, au pire comme une maladie de la terre. Cette gradation dans l’hérésie pagano-écologiste vise à détruire l’homme et finalement la Création tout entière.
Nos lointains ancêtres peignaient des bovins et des chevaux dans des cavernes. A Lascaux, 18 000 ans plus tard nous restons fascinés devant ce que ces fresques expriment de continuité, d’intemporalité, d’humanité. Il nous est rappelé notre place dans la Création, les taureaux dessinent rarement leur admiration et leur gratitude…
L’homme de Lascaux me parle et nous nous comprenons, mais le zombie de notre siècle triple injecté à trottinette électrique m’est totalement étranger, impossible de le comprendre.
Ce nouvel homme, cette anti-créature révolutionnaire ne mange plus de viande et estime qu’il doit « sauver » le climat à tout prix. Dans cet esprit il défend le droit des animaux, il combat l’élevage, la chasse à pied, à courre et la corrida.
Cependant, il ne voit aucun inconvénient à l’abattage rituel des animaux, il milite pour le droit à l’avortement de confort, il prépare l’euthanasie de ceux qui l’encombrent, accepte l’omniprésence de l’Etat dans sa vie jusqu’à la résidence surveillée pour lui et sa famille et tout cela au nom de la liberté, de l’égalité et de… la fraternité !?
Le taureau de corrida d’un noir abyssal, la force pure, la vie dans son exubérance est au milieu de l’arène. Il est la pupille d’un œil de pierre deux fois millénaires. Il est la porte d’entrée vers les racines les plus anciennes, les plus profondes, vers l’âme de l’humanité.
Le torero brave et finalement soumet la bête de combat. Pourquoi le torero risque-t-il sa vie, pourquoi fait-il de ce risque une œuvre d’art et pourquoi les spectateurs vibrent-ils à la beauté, la force, le courage, la virtuosité et la noblesse du combat ? Pour nous rappeler le sens de l’honneur ! Et ce rappel est bien utile quand un simple virus nous fait oublier nos grands-parents dans des mouroirs pour finir dans des sacs en plastiques ou encore quand une fille, une sœur sont repoussées, privées de réunion familiale parce qu’elles sont cas contacts ou ne sont pas injectées.
La corrida n’est pas le sacrifice d’un bouc émissaire, le matador s’expose comme ne s’expose pas le sacrificateur dans un abattoir halal ou cacher.
Il ne s’agit pas de donner la mort mais de confirmer notre vocation d’être humain.
Nier le péché originel c’est nier la mort et l’éternité tout à la fois. En niant l’évidence de la mort, celle-ci furtivement se glisse partout dans un pourrissement généralisé. La corrida nous met à notre juste place d’intendant de la Création et face à notre fugace mais noble existence pourvu qu’elle soit libre.
Nous ne sommes libres que d’aimer. Nous avons oublié d’aimer parce que nous avons progressivement oublié d’être libre.
Stéphanie Bignon